Utiliser la justice réparatrice autochtone pour réduire la violence fondée sur le genre

Real Humanitarian

Le Guatemala, avec une population de seulement 17 millions d’habitants, est l’un des endroits les plus dangereux au monde pour les femmes. Dans un pays où une femme est assassinée toutes les 12 heures, l’absence de services efficaces de prévention et d’intervention en cas de violence n’est pas seulement dangereuse, elle est mortelle.

De plus, la pauvreté est endémique, avec environ 59,3 % de la population qui vit en dessous du seuil de pauvreté. Plus de 40 % de la population guatémaltèque a moins de 15 ans. Par conséquent, investir dans la jeunesse est essentiel pour favoriser un changement social.

Grâce à l’appui du FIT, Real Humanitarian et son partenaire local SERniña/REALgirl ont testé l’impact et l’efficacité d’un programme holistique, axé sur la famille et l’équité entre les genres, de prévention et d’intervention en cas de violence à El Hato, au Guatemala. Leur « approche holistique à 3 volets » (H3V) novatrice comprenait :

a) des programmes complets d’intervention en cas de violence pour les victimes de violence,

b) des séances familiales de guérison des traumatismes et de prise en charge de soi, et

c) de l’éducation communautaire en matière de prévention de la violence.

Canadian Humanitarian collage 3.png (1.12 MB)

Les principales innovations de cette approche à trois volets incluent l’intégration des méthodes de justice réparatrice Maya, la mise en œuvre d’une approche de la prévention et de l’intervention en cas de violence axée sur la guérison, et l’implication des familles entières, y compris des garçons et des hommes, tout au long du processus.

Reconnaissant que la majorité de la violence est perpétrée par des hommes qui démontrent certains des points de vue les plus patriarcaux, il était crucial des impliquer tout au long du projet. L’approche H3V a impliqué les garçons et les hommes de manière significative tout au long du processus, et dans les trois volets de notre approche.

Des programmes positifs de masculinité ont été réalisés parallèlement aux programmes de renforcement du pouvoir des filles et des femmes.

Les garçons et les pères ont été inclus et ont reçu des thérapies de guérison spécialisées dans le cadre des interventions familiales, tandis que les hommes victimes de violence ont également reçu des services complets d’intervention en cas de violence.

De plus, les agresseurs masculins ont participé aux services d’intervention en cas de violence par le biais d’une approche de justice réparatrice. Des ateliers ont été organisés toutes les deux semaines pour les pères pendant la mise à l’essai. Les bénéficiaires et le personnel local ont reconnu que cet élément avait été essentiel à la réussite du projet.

Voici l’une des nombreuses histoires de réussites de ce genre:

Don* est un homme Maya Q’eqchi qui, à l’âge de 19 ans, a été recruté de force par l’armée guatémaltèque pendant la guerre civile. Pour les hommes autochtones qui ont été forcés de participer à la guerre civile guatémaltèque qui a duré plusieurs décennies, le traumatisme qu’ils ont subi en étant forcés de brutaliser et de tuer leur propre peuple est important. De nombreux experts attribuent aujourd’hui l’incidence extrêmement élevée de la violence fondée sur le genre à l’impact de la guerre sur de nombreux hommes guatémaltèques et à l’héritage de la violence qu’elle a laissé dans son sillage. 

Éventuellement, Don a atterri à El Hato, une petite ville dans les montagnes juste à l’extérieur d’Antigua, s’est marié et est devenu un père. Malheureusement, son traumatisme est resté présent dans sa vie. Don a utilisé l’alcool comme mécanisme d’adaptation et, parfois, il est devenu violent avec sa femme et ses enfants.

 Don et son épouse se sont inscrits pour participer au programme novateur H3V. Il a commencé à assister aux ateliers pour hommes et, à partir de là, il a demandé un soutien thérapeutique individuel avec le thérapeute de soutien masculin.

Don est devenu l’un des rares hommes qui ont demandé des ateliers pour les couples. Au début, sa femme ne voulait pas y assister. Il a donc courageusement assisté seul aux ateliers de couples. Finalement, à mesure que la relation entre Don et sa femme s’est améliorée, ils ont commencé à s’y rendre ensemble.  

En thérapie, Don a reconnu qu’un combat fondamental pour lui était lié à son manque d’estime de soi et à son immense haine de lui-même. Il ne croyait pas être digne de respect et d’appréciation pour qui il était ou pour ses contributions. Pour l’aider à se voir comme quelqu’un ayant des compétences et des connaissances, l’équipe de SERniña (REALgirl) l’a encouragé à planifier des activités dans la communauté pour les jeunes. Il a planifié un atelier de fabrication artisanale de cerfs-volants pour les enfants de la communauté, ce qui leur a permis de renouer avec une tradition culturelle locale.

Au cours du projet, Don a considérablement réduit sa consommation d’alcool. Il a commencé à reconnaître la valeur de sa femme et à l’impliquer dans les décisions familiales et financières. Il a commencé aussi à aider plus équitablement à la maison.  

 Il s’agit d’une histoire de réussite en matière de justice réparatrice

Même si Don était un auteur de violence dans sa maison, il a été directement impliqué dans le processus de guérison. Il a été traité avec compassion et compréhension du « pourquoi » derrière une grande partie de son comportement violent. Cela lui a permis de commencer à guérir de son propre traumatisme et d’assumer la responsabilité de ses actions, améliorant ainsi la relation avec sa famille et apportant la guérison et la sécurité à sa femme.  

 Aujourd’hui, Don est un leader de la communauté et il encourage d’autres hommes à s’impliquer en tant que défenseurs du programme.

*Déclaration de non-responsabilité : afin de protéger la vie privée de la personne, Don n’est pas le vrai nom du participant.

Canadian Humanitarial collage 4.png (901 KB)

< Arrière