Accroître l’accès aux droits à la santé sexuelle et reproductive par le développement des médias

Journalists for Human Rights

L’accès des femmes et des filles aux services de santé sexuelle et reproductive (SSR) reste un défi majeur au Mali. La crise économique et l’escalade des conflits ont entraîné des répercussions négatives sur la capacité des services publics à fournir des services de SSR. Cette situation tendue a également entraîné une augmentation de la violence fondée sur le genre et limité la capacité des femmes à participer à des activités économiques dans certaines régions.  

Les médias jouent un rôle important dans la formation de l’opinion publique sur les grandes questions sociétales. Des médias dynamiques, objectifs et axés sur les impacts peuvent contribuer à résoudre les problèmes des droits des femmes en amplifiant les voix des femmes et en mettant en lumière les obstacles sociaux au renforcement de leur pouvoir. Les médias maliens contribuent par inadvertance à la marginalisation des femmes en perpétuant des stéréotypes de genre nuisibles et des normes traditionnelles, en plus de ne consacrer que peu de temps d’antenne aux questions qui touchent les femmes et les filles, comme la santé et les droits sexuels et reproductifs (SDSR). 

Avec l’appui du Fonds pour l’innovation et la transformation, Journalists for Human Rights (JHR), en partenariat avec WILDAF, la Maison de la Presse et la Coalition OSC-PF, a mis à l’essai une approche novatrice intitulée « Promouvoir l’accès aux droits à la santé sexuelle et reproductive par le développement des médias au Mali ». Dans le but d’accroître l’accès aux services de SSR pour les résidentes de Bamako, JHR a tiré parti d’une approche en 3 volets pour former, mettre en réseau et coordonner les médias, les fonctionnaires gouvernementaux et les OSC afin de mener un plaidoyer en faveur de la SDSR.

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Approche 1 : Renforcement des capacités des médias et des OSC pour mener un plaidoyer en faveur de la SDSR, tout en abordant des questions structurelles qui entravent la capacité d’influencer efficacement le discours public.

L’accès à l’information est l’un des principaux obstacles à l’utilisation des services de SSR par les femmes et les filles. Avant le début de l’innovation, les médias locaux couvraient rarement les questions liées à la SDSR, tandis que les OSC locales n’avaient pas les compétences nécessaires pour vraiment rendre visibles les services de SSR, ce qui a conduit à un vide d’information.

JHR a accru la capacité des OSC à élaborer des stratégies de relations avec les médias et à mettre en œuvre des plans de communication stratégiques pour sensibiliser le public à la SDSR et façonner les politiques publiques et l’attitude du public à l’égard de la SDSR. Parallèlement, JHR a renforcé la capacité des médias à couvrir efficacement les questions liées à la SDSR d’une manière sensible au genre, en mettant l’accent sur la formation des femmes journalistes et des femmes représentantes des OSC afin de s’assurer que leurs voix sont au cœur du discours public sur la SDSR.

« Je travaille en journalisme depuis 2014, mais le projet du FIT a été pour moi un espace qui m’a permis d’en apprendre davantage sur la santé et les droits sexuels et reproductifs. Cela, grâce à la formation et au soutien d’experts et des partenaires du projet. Ainsi, grâce au soutien des mentors et des personnes-ressources de JHR, nous avons pu produire des articles de qualité (avec du contenu varié et enrichissant) sur des thèmes liés à la SDSR. 

Mieux encore, après une année de production, j’ai pu me familiariser avec les instruments juridiques signés par le Mali en lien avec la SDSR et connaître leur évolution grâce au « Layidumètre », un outil de suivi des engagements pris par l’État en matière de SDSR. La possibilité d’établir des relations durables avec les membres de la société civile impliqués dans le projet, qui sont également des sources potentielles dans le traitement de l’information, a également été utile. »

Alimatou Djénépo, journaliste de l’Annonceur (un organe de presse entièrement féminin), formée par JHR.

De plus, des dispositions ont été prises pour que les groupes marginalisés tels que les femmes, les personnes en situation de handicap et les personnes déplacées puissent avoir accès aux services de SSR la nuit, pour celles qui craignaient d’être vues pendant la journée. La participation des jeunes et des personnes en situation de handicap a été intégrée à la stratégie de sensibilisation à la SSR, ce qui a contribué à améliorer la portée du projet au niveau national.

Approche 2 : Utilisation ciblée des canaux de communication comme outil efficace pour alimenter et influencer les normes sociales, ainsi que pour initier des changements de comportement.

Afin d’influencer les normes et attitudes sociales à l’égard de l’accès à la SDSR, 80 articles sensibles au genre ont été produits sur un large éventail de sujets liés à la SDSR, tels que la violence fondée sur le genre, les mutilations génitales féminines et la planification familiale. Grâce à la couverture médiatique produite par les femmes, axée sur les femmes ou mettant en vedette les femmes, le projet a contribué à amplifier les voix des femmes et à accroître la couverture médiatique sensible au genre sur les questions de SDSR. En mettant en vedette des femmes en tant qu’expertes en la matière et détentrices de connaissances tant dans des forums et que dans des récits, le projet a aidé à combattre les stéréotypes sexuels nuisibles qui prédominaient dans le secteur des médias et qui ont renforcé les inégalités de genre.

Approche 3 : Bâtir de solides réseaux intersectoriels entre les médias et les OSC

La société civile et les médias jouent un rôle clé de surveillance pour assurer la reddition de comptes publique en matière de droits humains et de bonne gouvernance. Une relation forte entre les OSC et les médias est importante pour la promotion de la SDSR. Les OSC sont souvent une source de données fiables et à jour sur les questions de SDSR.  À ce titre, JHR a accru la collaboration des OSC avec les médias afin d’accroître la visibilité des questions de SDSR touchant les communautés ciblées. 

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« Nous sommes un réseau de jeunes et de bénévoles déterminés de plusieurs organisations et associations de la société civile qui travaillent dans le domaine de la santé sexuelle et reproductive pour les adolescentes et les jeunes. En plus de 10 ans, c’était la première fois que nous travaillions avec les médias pour la mise en œuvre d’un projet.

Nous avons participé à toutes les étapes du projet du début à la fin. Au-delà de nos interventions à la radio, le projet nous a permis de renforcer nos relations avec les différents médias et radios ; avant cela, nous nous étions limités à la promotion de nos activités sur les réseaux sociaux. Nous avons participé à des entrevues avec les médias impliqués dans le projet et nous avons fourni de l’information pour des articles dans la presse écrite, la télévision sur le Web et des capsules vidéo. Le projet nous a montré qu’il était plus facile d’atteindre notre cible à travers les médias. »

-  Boubacar Diarra, président national du réseau des ambassadeurs de la jeunesse pour FP Mali. JHR a estimé que 158 rapports auraient atteint 7 millions de personnes.

JHR a reconnu qu’il faut du temps pour améliorer l’accès aux services de SSR et que la sensibilisation est fondamentale pour encourager les changements de comportement. Au total, 30 255 personnes auraient eu accès aux services de SSR par l’intermédiaire de cliniques mobiles. JHR a constaté que la mise à niveau et le renforcement des relations entre les OSC et les médias ont permis d’accroître la visibilité des enjeux d’égalité des genres et de SDSR, contribuant à la normalisation du sujet. Les journalistes et les médias qui ont été formés et impliqués dans le projet ont continué à produire des rapports de qualité, ce qui démontre la durabilité de l’approche novatrice.

Il convient de noter que les résultats de la mise à l’essai de l’innovation ont été bien reçus par diverses parties, dont l’ONSAR, l’institution gouvernementale responsable de la SDSR au Mali. Au cours d’une cérémonie organisée par JHR pour reconnaître les différents groupes qui avaient participé au projet de mise à l’essai du FIT, le gouvernement local a confirmé qu’il financerait la formation de 300 journalistes supplémentaires en utilisant l’approche du projet soutenu par le FIT.

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